Constat Radiologique 'Rémanence de la radioactivité d’origine artificielle'
Le constat radiologique « Rémanence de la radioactivité d’origine artificielle » mesure et analyse l’évolution des niveaux de radioactivité liés aux essais d’armes nucléaires entre 1950 et 1980 et à l’accident de Tchernobyl dans certaines zones du territoire français.
Trente ans après l’accident de Tchernobyl de 1986, certaines zones du territoire français métropolitain témoignent (cf. carte ci-dessous) encore de niveaux de radioactivité supérieurs ou très supérieurs à ceux observés dans le reste de l’Hexagone. Elles constituent, avec les zones soumises aux retombées des essais d’armes nucléaires aériens entre 1950 et 1980, les « zones de rémanence de la radioactivité artificielle ».
Zones d'étude de la rémanence de la radioactivité artificielle
Dépôts théoriques en césium 137 provenant des essais nucléaires atmosphériques et de l’accident de Tchernobyl
Dans les zones concernées des Vosges, du Jura, des Alpes du Sud, des Pyrénées et de l’est de la Corse, l’IRSN a réalisé en 2013 et 2014 des prélèvements afin de mesurer les niveaux de radioactivité artificielle et d’expliquer leurs évolutions dans l’espace et le temps.
Le césium 137 issu des retombées de Tchernobyl et des essais aériens est l’indicateur principal des niveaux de radioactivité dans les 350 échantillons examinés. Le strontium 90 (50 échantillons) est quant à lui un marqueur des retombées des essais aériens avec le plutonium 239, le plutonium 240 et l’américium 241 (49 échantillons au total).
Analyse et mesures des niveaux de radioactivité
Dans les lacs du Mercantour, la radioactivité artificielle évolue faiblement au fil des années. Dans ces « milieux fermés », la persistance d’éléments radioactifs dans l’eau, les mousses aquatiques et les sédiments est élevée. En comparaison, dans les « milieux ouverts » que constituent les fleuves et les rivières de l’est de la Corse et du Mercantour, l’activité en césium 137 a nettement diminué depuis les premières mesures réalisées en 1986-1987.
Dans les sols des massifs des Vosges, du Jura, des Alpes du Sud et de Corse, les activités en césium 137 sont toujours les plus élevées de France. Elles sont supérieures à 10 000 becquerels par mètre carré (Bq/m2), soit 8 fois la moyenne des sols français.
Dans les prairies d’altitude des Alpes du sud, des activités supérieures à 100 000 Bq/m2 peuvent être observées sur des « points chauds » correspondants à de très petites surfaces (quelques dm2 à un m2 environ).
Dans les sols des Pyrénées, l’activité en césium 137, plus faible à 3 000 Bq/m2, provient pour l’essentiel des essais nucléaires.
Dans les denrées alimentaires, malgré des intensités de transfert du césium variables en fonction notamment des propriétés des sols, les niveaux de radioactivités des échantillons issus des zones de rémanence sont le plus souvent plus élevés que ceux provenant du reste du territoire.
C’est notamment le cas du lait dont l’activité en césium 137, en moyenne de 0,32 Bq/litre sur les zones étudiées se distingue nettement de la gamme d’activités du lait produit ailleurs en France : entre 0,004 et 0,03 Bq/l. Une différence encore plus importante est constatée pour les denrées des forêts (baies, champignons et gibiers), dont l’activité en césium 137 est plus variable peut atteindre plusieurs centaines de Bq/kg frais.
Évaluation de la dose reçue par la population
En 2015, un habitant des zones les plus touchées par les retombées de Tchernobyl (est de la France) reçoit une dose moyenne de 37 microsieverts par an (µSv/an) contre 5,4 µSv/an pour une personne résidant ailleurs en France. Ces doses sont principalement dues à l’exposition externe au rayonnement émis par le césium présent dans les sols.
Malgré les niveaux de radioactivités très élevés mentionnés précédemment, les « point-chauds » d’altitude ne peuvent occasionner, en raison de leur taille très réduite et de leur localisation, que des doses très modérées liées à des durées d’exposition limitées. Un bivouac de quelques heures sur un de ces points conduirait à une dose de l’ordre de 10 µSv.
La contribution de l’incorporation de césium via l’ingestion de denrées est en moyenne beaucoup plus faible, inférieure à 1 µSv/an. Elle peut toutefois devenir non-négligeable pour les personnes consommant beaucoup de champignons et de gibier issues des zones les plus touchées : de l’ordre de 80 µSv/an pour un consommateur régulier et potentiellement jusqu’à 570 µSv/an pour un gros consommateur.