Projet GIPSIS

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21/10/2018

Dernière mise à jour en octobre 2018

 

​Le projet GIPSIS vise à mettre au point une stratégie thérapeutique innovante du syndrome hématopoïétique (destruction partielle ou totale des cellules souches sanguines) chez les patients atteints d’un syndrome aiguë d’irradiation, en générant des cellules souches hématopoïétiques (cellules à l’origine des cellules sanguines) à partir de cellules souches1 induites (iPS). Il a été lancé en 2013 pour trois ans avec Sorbonne Université. Le projet doit définir les conditions de mise en place d’un protocole de traitement par injection des cellules souches hématopoïétiques obtenues par reprogrammation de cellules de peau.

 

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Figure 1. Principe de la thérapie proposée par GIPSIS. © IRSN

 

 

Contexte et objectifs

 

Le syndrome aigü d'irradiation (SAI) survient après l'exposition ponctuelle d'une importante partie du corps à une forte dose de rayonnements ionisants. Ce syndrome peut notamment toucher des professionnels lors d'un accident d'irradiation ou de criticité sur une installation nucléaire ; il a aussi atteint les victimes des bombardements de Nagasaki et Hiroshima, et pourrait toucher celles d'un acte de malveillance impliquant une source de radioactivité. La forme hématopoïétique de ce syndrome affecte la moelle osseuse et se traduit par une destruction partielle ou totale des cellules souches hématopoïétiques (à l'origine des cellules sanguines) et des lymphocytes (cellules du système immunitaire). Cette destruction mène à une chute de l'immunité et à un défaut de la coagulation du sang, avec pour conséquences des infections et des hémorragies internes importantes et potentiellement mortelles.

 

Pour la prise en charge médicale des irradiations accidentelles, un protocole international existe, le classement Metropol (Medical Treatment Protocols for radiation accident victims), et pour la forme hématopoïétique en particulier, il existe un consensus européen qui établit un protocole de gestion thérapeutique des accidents d’irradiation de masse. L'irradiation accidentelle étant souvent hétérogène, dans certains cas, les régions de la moelle osseuse qui n’ont pas été touchées par l’irradiation peuvent rétablir la production hématopoïétique. Le consensus européen établit, dans un premier temps, un traitement aux cytokines pour stimuler la production des cellules sanguines. Si le dysfonctionnement de la moelle osseuse (en l’espèce, l’aplasie) persiste durant plus de 14 jours, le patient fait l’objet d’une greffe de cellules souches hématopoïétiques. Or, le traitement en urgence de population lors d’un accident, d’un acte de malveillance ou de militaires lors d’un conflit nucléaire nécessite de disposer de produit congelable, prêt à l’emploie, permettant de traiter un grand nombre d’individus.

 

Le projet GIPSIS a pour objectif, via la thérapie cellulaire, de trouver une solution à cette problématique. Il s'appuie sur l’utilisation de cellules souches dites induites (cellules iPS) pour traiter le syndrome. Ces cellules ont été obtenues pour la première fois en 2006 par des chercheurs de l’université de Kyoto, en reprogrammant des cellules adultes différenciées pour les faire revenir à un état de cellule embryonnaire capable de se différencier en n’importe quelle autre cellule. Cette reprogrammation se fait en introduisant des gènes essentiels au maintien des propriétés des cellules embryonnaires. Dans le projet GIPSIS, ces gènes ont été introduits en utilisant un épisome (ADN circulaire) qui s’élimine au fur et à mesure des divisions des cellules iPS lors de leur culture. Les cellules iPS permettent ensuite d’obtenir des cellules souches hématopoïétiques adultes multipotentes (i.e. capables de se différencier uniquement en cellules sanguines ou en cellules immunitaires). Les cellules iPS étant obtenues à partir de n’importe quel tissu du patient, elles sont donc compatibles à 100 % avec lui et évitent la maladie du greffon contre l’hôte qui peut arriver lorsque les cellules du donneur ne sont pas suffisamment compatibles avec celles du patient (receveur) : les cellules du système immunitaire nouvellement produites attaquent alors l’organisme du patient.

 

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Figure 2. Reprogrammation de cellules de peau en cellules souches multipotentes (cellules iPS). © IRSN

 

La suite du projet GIPSIS est le recours à des cellules iPS issus de banques universelles. Elles présentent l’avantage de fournir des cellules souches iPS "médicament", de grade clinique. Ces banques sont actuellement en cours de développement pour de futurs essais cliniques. Elles permettront d’utiliser les cellules iPS comme source de cellules souches pour la thérapie cellulaire pour une grande proportion de la population avec un nombre très limité de cellules issues de donneurs "universels".


 

Déroulement du projet


Le projet se déroule en trois temps expérimentaux (la coordination étant assurée par l’IRSN) :

  • la première étape (sous la responsabilité de Sorbonne université) consiste à démontrer que les cellules souches hématopoïétiques générées à partir de cellules iPS issues de donneurs sains sont capables de reconstituer l’hématopoïèse (production de cellules sanguines et immunitaires) chez un organisme immunodéprimé. La faisabilité du protocole est établie in vitro (tests effectués sur des cultures de cellules en laboratoire) et in vivo (test de la thérapie sur un organisme vivant) en prenant pour modèle la souris irradiée et immunodéprimée ;

Schéma_Gipsis_etape_projet_1.jpgFigure 3. Protocole de différenciation des cellules iPS en cellules souches hématopoïétiques © IRSN

 

  • la deuxième étape (sous la responsabilité de Sorbonne Université en collaboration avec le département d’hématologie de l’Hôpital Saint-Antoine) vise à établir que les cellules iPS issues de patients atteints des maladies hématologiques ont les mêmes capacités que les cellules issues d’un donneur sain en utilisant les mêmes méthodes qu’à la première étape. Le principal enjeu dans cette deuxième étape est de vérifier qu’il n’y ait pas d’anomalie génétique  dans les cellules produites ;
  • la troisième étape consiste à définir le produit final injectable pour traiter le SAI. Le but est de produire des cellules souches hématopoïétiques les plus pures possible dans l’objectif de traiter un patient adulte. Le protocole utilisé respecte les bonnes pratiques de fabrication établies au niveau français et européen pour assurer la qualité des produits pharmaceutiques.

 

 

Premiers résultats et perspectives

 

L’équipe du projet GIPSIS est la première au monde à avoir produit des greffons hématopoïétiques fonctionnels à partir de cellules humaines iPS, capables de se renouveler et d’assurer la reconstitution hématopoïétique chez des souris immunodéprimées. La prochaine étape, pour valider l’utilisation des cellules iPS, consiste à aller vers les essais cliniques. Actuellement, des efforts européens et internationaux se font pour développer des banques de cellules iPS de grade clinique issues de donneurs universels. En France, GAIT (Global Alliance for iPSC Therapies), une initiative britannique, s’implantera en 2019 sur le site d’Évry. Ces banques permettront de fournir les équipes de recherche en cellules iPS de grade clinique.

 

Dans la continuité du projet GIPSIS, l’équipe de recherche prévoit de démontrer la faisabilité de la production et la différenciation de cellules iPS pour obtenir des greffons de cellules souches sanguines de taille suffisante pour traiter un patient humain (3000 fois plus grand qu’une souris). Ce nouveau projet, IPS-clinique, se focalise sur l’industrialisation du procédé développé dans GIPSIS en collaboration avec I-Stem pour la production de cellules iPS et une plateforme de thérapie cellulaire de l’Établissement français du sang (EFS) pour leur différentiation en cellules souches hématopoïétiques. Cette étude se fera en respectant les standards de biosécurité de l’ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé) en matière de médicament à thérapie innovante pour obtenir l’autorisation de procéder à des essais cliniques par la suite. Ces critères impliquent une production dans le milieu le plus sécurisé possible à savoir :

  • Absence de contaminant dans les cellules (bactéries, virus…)
  • Élimination de tout produit d’origine animale
  • Contrôle drastique des cellules à chaque étape pour vérifier qu’elles soient fonctionnelles, qu’elles n’aient aucune anomalie génétique ou contamination…
  • Production d’un greffon de taille suffisante pour traiter un Homme

 

Sous réserve de succès à ces tests, la thérapie proposée par le projet GIPSIS présente un immense potentiel pour la création d’un traitement patient-spécifique de la forme hématopoïétique du SAI mais aussi pour d’autres maladies hématologiques. Elle ouvre également la voie à l’utilisation des cellules iPS pour d’autres applications médicales comme la constitution d’organes plus complexes, par exemple le foie ou le rein. La constitution d’une banque de cellules iPS issues de donneurs universels prend alors tout son sens.

 

1.  Une cellule souche est une cellule indifférenciée, capable de s'auto-renouveler, de se différencier en d'autres types cellulaires et de proliférer en culture. Les cellules souches sont issues soit de l'embryon, soit du fœtus, soit de tissus adultes avec ou sans transformation. Grâce à ces propriétés, elles peuvent servir à régénérer ou recréer des tissus détruits (thérapie cellulaire).

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Caractéristiques
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​Dates : 2013-2017

Financement : Direction Générale de l’armement (ASTRID/ANR program - ANR-13-ASTR-0009), Établissement français du sang (EFS) (APR 2013 & Combattre la leucémie)

Partenaires : Sorbonne Université, Établissement français du sang (EFS), Inserm

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Laboratoire IRSN impliqué
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