Conséquences moléculaires des expositions aiguë et chronique à l'uranium sur le transcriptome murin.
Magali TAULAN Thèse de doctorat de l'université de Montpellier spécialité génétique, 190p. soutenue le 18 juin 2004
L'uranium est un élément naturellement présent dans les sols, les roches et les eaux. L'utilisation de cet élément dans l'industrie nucléaire (de l'extraction du composé uranifère jusqu'à son exploitation) et par les militaires (obus et plaques de blindages) augmente les risques de sa présence dans l'environnement. Les conséquences d'une incorporation de l'uranium, par les organismes vivants et notamment par l'homme, est une préoccupation grandissante de notre société.
Après une exposition unique à une forte quantité de ce métal, cas majoritairement rencontré par les travailleurs de l'industrie nucléaire, il a été établi que l'uranium induit des altérations rénales pouvant aboutir à une insuffisance rénale aiguë. Cependant, peu de données sont disponibles quant aux altérations moléculaires consécutives à l'incorporation d'uranium.
Dans le cadre d'une exposition chronique, risque auquel peut être exposée la population générale, seules quelques études sur la fonction rénale ont été réalisées à ce jour. Ces travaux concernent essentiellement l'analyse des paramètres biologiques et des changements morphologiques du rein.
Le principal objectif de ce travail était d'évaluer les altérations moléculaires induits par l'uranium. Pour cela, nous avons utilisé des approches classiques de toxicologie et mis en place une technique d'analyse globale: SAGE (Serial Analysis of Gene Expression).
Après contamination aiguë, nous avons mis en évidence une altération de la fonction rénale et défini un catalogue des différents transcrits représentatifs des événements moléculaires consécutifs à l'incorporation de l'uranium. Plus de 14.000 transcrits ont été identifiés, parmi lesquels 224 gènes qui présentent une variation de l'expression génique. Ces derniers ont pu être classés dans différentes catégories de processus cellulaires comme l'inflammation, le stress oxydant, les transporteurs cellulaires, la transduction du signal, l'apoptose, le métabolisme et le catabolisme.
Dans le cas d'une exposition chronique, nous avons réalisé une étude similaire. Les animaux, exposés quotidiennement à l'uranium via l'eau de boisson, présentent une augmentation de la quantité d'uranium dans les reins et une légère hausse de la créatinine sanguine. En plus de ces modifications qui ne traduisent pas une véritable altération de la fonction rénale, une variation au niveau moléculaire a également été observée avec une modification de l'expression de plus de 20 gènes. L'analyse de ces transcrits montre que l'ingestion chronique d'uranium altère de nombreux processus cellulaires comme la voie du stress oxydant, de la transduction du signal, du métabolisme, du catabolisme et des transporteurs cellulaires.
L'ensemble de ces données nous a permis de valider l'utilisation de l'approche génomique SAGE dans le domaine de la toxicologie, en établissant un profil d'expression génique des évènements relatifs à une intoxication à l'uranium. L'analyse des conséquences moléculaire devrait permettre une meilleure compréhension de la physiopathologie rénale, et de découvrir des marqueurs précoces d'une contamination à l'uranium, des moyens plus efficaces de décorporation de cet actinide et de nouvelles cibles thérapeutiques.