Risque d'explosion d'origine interne dans les centrales nucléaires d'EDF : L'IRSN va réaliser une évaluation technique
D’une manière générale, la présence de gaz inflammables, de produits chimiques et de poussières de matières combustibles dans les installations nucléaires génère des risques d’explosion qui doivent être maîtrisés par la mise en œuvre de dispositions de prévention, de détection et de surveillance, de façon à éviter la formation d’atmosphères explosives. Il convient également de prévoir des dispositions de limitation des conséquences d’une explosion qui pourrait néanmoins se produire accidentellement.
Dans les réacteurs à eau sous pression, le principal risque d’explosion est lié à la présence d’hydrogène. En particulier, une canalisation amène de l’hydrogène pur depuis le parc à gaz jusque dans les locaux du bâtiment des auxiliaires nucléaires où il est injecté dans le circuit primaire pour obtenir des conditions chimiques favorables à une limitation de la corrosion.
Dans ces locaux, une fuite d’hydrogène non maîtrisée pourrait, en présence d’une source d’inflammation, entraîner une explosion de gaz dont les effets (onde de choc, élévation de température, émission de projectiles) seraient susceptibles d’affecter, d’une part le personnel présent dans l’installation, d’autre part les équipements et structures nécessaires à la conduite et au maintien à l’état sûr de l’installation.
A cet égard, à la suite d’une fuite de débit important, liée à une erreur opératoire, qui a affecté en 1998 la canalisation d’hydrogène alimentant le circuit primaire de la tranche 3 du réacteur de Chinon, l’IRSN a réalisé une analyse approfondie afin d’en identifier précisément le déroulement, mais aussi les conséquences possibles pour la sûreté dans l’éventualité de l’inflammation du nuage de gaz ainsi formé. La simulation réalisée a mis en évidence qu’une explosion dans les locaux du bâtiment des auxiliaires nucléaires aurait pu endommager des équipements importants pour la sûreté. Plus globalement, l’analyse a mis en évidence la nécessité de revoir la maîtrise des risques d’explosion associée à l’hydrogène pour l’ensemble des réacteurs.
EDF s’était alors engagé à mieux prendre en compte les risques d’explosion dans ses installations et a, depuis lors, élaboré un référentiel d’exigences de sûreté concernant la protection contre le risque d’explosion interne aux sites.
L’IRSN a examiné ce référentiel de sûreté et a présenté les conclusions de son examen à l’occasion de la réunion du Groupe permanent d’experts pour les Réacteurs du 10 mars 2005 au cours de laquelle le Groupe permanent, sur proposition de l’IRSN, a recommandé qu’EDF identifie les locaux critiques (locaux dans lesquels pourrait survenir accidentellement une atmosphère explosive) qui nécessiteraient des dispositions complémentaires de protection. Une nouvelle version consolidée du référentiel a alors été élaborée par EDF qui a poursuivi son application sur les sites avec, en particulier, la définition de modifications à réaliser dans le cadre des troisièmes visites décennales des réacteurs de 900 MWe.
Les dispositions définies de maîtrise des risques d’explosion doivent bien sûr être convenablement mises en œuvre sur les différents sites. A cet égard, l’ASN a identifié un défaut générique de maintenance des tuyauteries véhiculant de l’hydrogène pur depuis le parc à gaz jusque dans les locaux du bâtiment des auxiliaires nucléaires. Ces tuyauteries, en acier noir, sont sujettes à la corrosion notamment en ambiance humide. Ainsi, à l’occasion d’inspections conduites par l’ASN (auxquelles participaient des experts de l’IRSN), des corrosions avancées ont été constatées à plusieurs reprises sur ces tuyauteries, notamment au CNPE de Cruas. Ces inspections ont également mis en évidence des écarts à la réglementation applicable aux équipements contenant des matières dites « TRICE » (toxiques, radioactives, inflammables, corrosives, explosives) tels que des défauts de signalisation et de repérage. Il est évidemment nécessaire qu’EDF maintienne dans l’état spécifié l’ensemble des matériels intervenant dans la maîtrise des risques d’explosion sur les sites, avec notamment la réalisation de contrôles et de surveillances adaptés et la correction des anomalies décelées.
Les dispositions qui seront proposées par EDF à la suite des observations effectuées lors des inspections précitées feront l’objet d’une évaluation technique par l’IRSN, qui sera transmise à l’ASN.