Étude mécaniste des effets transgénérationnels des radiations ionisantes alpha et gamma chez Daphnia magna
Florian Parisot a soutenu sa thèse le 15 décembre 2015 au CEA de Cadarache.
Les activités anthropiques liées à l'industrie nucléaire contribuent à des rejets continus de radionucléides dans les écosystèmes terrestres et aquatiques. Au cours des dernières décennies, le risque écologique des radiations ionisantes est devenu une préoccupation publique, réglementaire et scientifique majeure pour la protection des écosystèmes. À ce jour, très peu d’études se sont intéressées aux situations d’exposition chroniques à faibles doses, bien que ces situations soient représentatives des conditions environnementales réelles. Comprendre comment les radiations ionisantes affectent les espèces au cours de plusieurs générations et à différents niveaux d’organisation biologique est un enjeu majeur en radioécologie. Dans ce contexte, les travaux réalisés au cours de ce doctorat visent à apporter de nouvelles connaissances relatives aux effets des radiations ionisantes au cours d’une exposition multigénérationnelle de l’invertébré aquatique, Daphnia magna. Pour répondre à cet objectif, une stratégie en deux étapes a été mise en place. Tout d’abord, une irradiation gamma externe à des débits de dose pertinents du point de vue environnemental a été réalisée sur D. magna pendant trois générations successives (F0, F1 et F2). Les objectifs de cette démarche étaient d’évaluer si de faibles débits de dose d’irradiation gamma externe induisaient une aggravation des effets sur la survie, la croissance et la reproduction des daphnies au cours des générations et de tester s’il existait une accumulation transgénérationnelle d’altérations à l’ADN. Les résultats mettent en évidence une accumulation et une transmission d’altérations de l’ADN au fil des générations, en parallèle d’une augmentation de la sévérité des effets sur la croissance et la reproduction entre les générations F0 et F2. Toutefois, des effets moins prononcés ont été observés au cours de la génération F1, laissant présager des processus de réparation de l’ADN transitoirement plus efficaces. Dans un second temps, les données d’irradiation gamma externe et celles d’une étude antérieure de contamination alpha interne ont été analysées à l’aide du modèle DEBtox (Budget d’Énergie Dynamique appliqué à la toxicologie), afin d’identifier et de comparer les causes de l’aggravation transgénérationnelle des effets entre les deux types de rayonnements. Dans les deux cas, deux modes d’action métaboliques distincts ont été nécessaire pour expliquer l’aggravation des effets sur la croissance et la reproduction de D. magna au cours des générations. Les résultats de modélisation suggèrent que les rayonnements alpha et gamma agissent selon deux combinaisons différentes de modes d’action, illustrant toute la complexité des processus biologiques mise en jeu. Ce projet de recherche contribue à apporter des connaissances significatives sur les effets chroniques des radiations ionisantes et indique clairement qu’il est important, à l’avenir, d’étudier et de comprendre les effets transgénérationnels des radiations ionisantes à faibles doses.