Radiothérapie guidée par l'image : pratiques et prise en compte des doses associées
18/05/2021
L'utilité de l'imagerie en radiothérapie, tant au stade de la planification que du traitement, est bien établie, en particulier pour les techniques de radiothérapie de haute précision. Toutefois, l'utilisation croissante de ces images et la répétition d'acquisition d'images avant et au cours du traitement d'un patient peut conduire à délivrer des doses additionnelles à la dose thérapeutique non négligeables, surtout pour ce qui concerne les organes et tissus sains situés dans un volume bien plus large que le volume cible.
Les dispositifs d’imagerie dans les salles de traitement sont utilisés pour vérifier et prendre en compte le positionnement du patient ou de la tumeur au cours du traitement : il s’agit de radiothérapie guidée par l'image ou IGRT (Image Guided Radiation Therapy). L’IGRT permet d'améliorer la précision du positionnement du patient et donc la qualité du traitement. L’installation de ces dispositifs d’imagerie a augmenté de façon très importante depuis 2009. Ces dispositifs permettant l’acquisition d’images au cours du traitement utilisent le plus souvent des rayons X. En 2013, 83 % des accélérateurs de moins de 4 ans étaient équipés d'un système d'imagerie en mode kilovoltage (kV) pour le contrôle du positionnement, en plus de l'imagerie portale réalisée au moyen d’un faisceau de haute énergie utilisé pour le traitement (MV). La proportion d'accélérateurs équipés de systèmes réalisant une imagerie en coupe de type kV-CBCT est passée de 15 % en 2009 à 41 % en 2013.
La majorité des systèmes de positionnement étant irradiants, les principes de la radioprotection des patients doivent être appliqués, à savoir justifier et optimiser (principe ALARA) l’utilisation de ces images. Par exemple, pour une acquisition 3D en utilisant le mode kV-CBCT pour le traitement de la prostate, les doses délivrées par l’imagerie (D50% à la prostate) sont généralement entre 10 et 20 mGy par contrôle. Pour un traitement avec 40 séances et un contrôle quotidien, la dose totale est de plusieurs centaines de milligrays et peut dépasser 1 Gy si plusieurs images sont réalisées quotidiennement.
Ainsi, dans son rapport n°29 publié en 2014 concernant la radiothérapie guidée par l'image, la SFPM note en préambule que l'utilisation clinique des équipements d'aide au positionnement à rayons X nécessite des réflexions sur les stratégies de positionnement, les protocoles d'acquisition et la gestion des doses délivrées au patient lors de ces procédures.
De plus, au cours de ses inspections dans les centres de radiothérapie, l’ASN a constaté une hétérogénéité dans les pratiques concernant les stratégies d'acquisition des images de positionnement et la gestion des doses liées à cette imagerie.
Dans ce contexte, l’ASN a saisi l’IRSN en février 2018 afin d’obtenir son avis sur l'utilisation de l'imagerie de positionnement en radiothérapie et la gestion des doses additionnelles délivrées au patient lors de la réalisation de ces images (saisine CODEP-DIS-2018-n°010043). Il est en particulier demandé à l’IRSN de :
- présenter un état des lieux des pratiques en termes d'utilisation de l'imagerie de positionnement et de gestion de ces doses par les services de radiothérapie en France ;
- présenter les solutions industrielles disponibles pour prendre en compte ces doses et les optimiser, ainsi que les difficultés associées ;
- identifier les utilisations de l'imagerie pour lesquelles les enjeux sont les plus importants (type d'images, localisation, population) en termes de radioprotection pour les patients ;
- indiquer si des recommandations sont à établir par les sociétés des professionnels impliqués en radiothérapie ;
- considérer plus particulièrement le cas des traitements pédiatriques.
Afin de répondre à la demande de l’ASN, le rapport IRSN n°2020-00796 concerne les pratiques d’imagerie médicale de positionnement en cours de radiothérapie et la prise en compte des doses additionnelles liées à cette imagerie.
La saisine de l’ASN précise que l’analyse de l’IRSN doit s'appuyer sur des échanges avec les professionnels et les constructeurs, et, le cas échéant, avec les laboratoires de recherche impliqués sur cette thématique. De plus, les éventuelles recommandations européennes et internationales doivent être prises en compte.
Aussi, l’IRSN a conduit :
- une étude bibliographique sur l’imagerie de positionnement en radiothérapie et sur les doses associées, présentée aux chapitres 2 et 3 du présent rapport, en considérant particulièrement les recommandations publiées par les sociétés savantes française (SFRO : RECORAD) et américaine (AAPM Report TG 180) ainsi que de l’AIEA, synthétisées dans le chapitre 4 du présent rapport ;
- une analyse des documents transmis et des échanges (synthétisés dans le chapitre 5 du présent rapport) avec :
- les constructeurs de dispositifs d’imagerie en salle de traitement de radiothérapie : Accuray, Brainlab, Elekta et Varian ;
- les sociétés DOSIsoft, Philips et RaySearch concernant les solutions de calcul des doses d’imagerie ;
- la plateforme DOSEO du CEA concernant le projet AID-IGRT (calcul par méthode Monte-Carlo des doses additionnelles des systèmes d’imagerie kV) ;
- un état des lieux des pratiques en termes d'utilisation de l'imagerie de positionnement et de gestion de ces doses par les services de radiothérapie en France en réalisant une enquête auprès de 40 centres de radiothérapie représentatifs au cours du 2nd semestre 2019 (détaillé au chapitre 6 du rapport).
Cette expertise de l'IRSN a donné lieu à la rédaction d'un rapport ainsi qu'à un avis remis à l'Autorité de sûreté nucléaire.
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