Détection de fissures sur des tuyauteries du système d’injection de sécurité des réacteurs n° 1 et n° 2 de la centrale nucléaire de Civaux
Au cours de l’arrêt décennal du réacteur n° 1 de la centrale nucléaire de Civaux, qui a débuté le 21 août 2021, EDF a procédé à un contrôle par ultrasons de plusieurs soudures du circuit d’injection de sécurité (RIS), conformément au programme de maintenance préventive en vigueur.
Le circuit d’injection de sécurité est un système de sauvegarde qui injecte de l’eau borée dans le circuit primaire principal du réacteur pour refroidir le cœur en cas de brèche sur le circuit primaire. L’objectif est ainsi de maintenir un inventaire en eau suffisant dans le cœur permettant de refroidir le combustible.
Le système RIS est composé de deux voies indépendantes connectées au circuit primaire via un piquage en branche chaude [1] et en branche froide [2] de chacune des quatre boucles du circuit primaire.
Connexion du système d’injection de sécurité à la branche froide d’une boucle du circuit primaire principal
Les contrôles par ultrasons réalisés sur le réacteur n° 1 de Civaux ont révélé la présence de défauts à proximité des soudures de certains coudes de tuyauteries (cf. figure). Conformément à la stratégie de maintenance en vigueur, les contrôles ont alors été étendus par EDF aux soudures attenantes. Afin de déterminer l’origine de ces fissures, les tuyauteries ont été découpées et les soudures concernées envoyées en laboratoire pour expertise. Par examen métallographique et microscopique, EDF a pu ainsi déterminer la nature et la profondeur des défauts détectés. En première analyse, il s’agit de fissuration par corrosion sous contrainte.
La corrosion sous contrainte est un mode d’endommagement qui résulte généralement de l’action conjuguée d’une contrainte mécanique et d'un milieu agressif vis-à-vis du matériau. Afin de mieux appréhender les facteurs à l’origine de la corrosion observée, EDF a engagé une vérification des dossiers de fabrication. En parallèle, il procède à une revue de performance des procédés de contrôle employés. Ces analyses visent à élaborer un programme de vérification des soudures susceptibles d’être concernées par le phénomène.
En cas d’évolution de ces défauts sur les tuyauteries du système d’injection de sécurité, cela pourrait conduire à une fuite ou à une rupture. Si cette rupture intervient sur une tuyauterie, cela conduit à une situation de brèche sur le circuit primaire principal, les coudes endommagés étant situés en aval des organes d’isolement des circuits RIS. La voie du circuit RIS non affectée par la brèche assurerait alors l’injection d’eau dans le circuit primaire et le refroidissement du cœur. Si en revanche cette rupture ou fuite survenait simultanément sur plusieurs tuyauteries concernées, le refroidissement du cœur du réacteur ne pourrait potentiellement plus être assuré. Des événements comme un séisme (générant des contraintes mécaniques dans les tuyauteries concernées) ou une mise en service de l’injection de sécurité (provoquant une arrivée d’eau froide dans des tuyauteries chaudes) peuvent solliciter simultanément ces circuits.
EDF a décidé d’arrêter préventivement le réacteur n° 2 de Civaux le 20 novembre dernier, afin de procéder à des contrôles anticipés des soudures, l’arrêt décennal du réacteur étant prévu dans quelques mois. Les premiers résultats des contrôles sur ce réacteur mettent en évidence la présence d’anomalies au niveau des mêmes soudures que sur le réacteur n° 1. De ce fait, EDF a décidé le déchargement des assemblages combustibles du cœur du réacteur n° 2 pour procéder à des investigations poussées et aux réparations qui s’avèreraient nécessaires.
Une anomalie générique relative aux réacteurs de 1450 MWe ne pouvant, à ce stade, être exclue, EDF a décidé la mise à l’arrêt préventive des deux réacteurs de la centrale nucléaire de Chooz B dans les Ardennes à partir du 16 décembre, qui sont de même type que ceux de Civaux (réacteurs de 1450 MWe), afin de procéder à des contrôles.
L’IRSN estime que la décision d’EDF de mettre à l’arrêt les deux réacteurs de Chooz B, en plus des deux réacteurs de Civaux, est satisfaisante du point de vue de la sûreté. Les contrôles sur les réacteurs de Chooz B permettront de déterminer s’ils sont affectés par les mêmes défauts. Des investigations approfondies doivent être menées afin de déterminer les phénomènes à l’origine des fissures de corrosion sous contrainte et définir le périmètre des contrôles à réaliser.
Des actions de contrôle pourraient s’avérer nécessaires sur les autres réacteurs en exploitation.
Notes :
- Après la sortie de la cuve du réacteur.
- Avant l’entrée de la cuve du réacteur.