Cancer de la thyroïde et accident nucléaire, publication d'un état de connaissances
Le Bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH) fait le point sur l'incidence des cancers de la thyroïde depuis 30 ans, sur ses facteurs de risques et les stratégies de santé publiques mises en place.
En ce trentième anniversaire de l'accident de Tchernobyl, le Bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH) fait le point sur l'incidence des cancers de la thyroïde depuis 30 ans, sur ses facteurs de risques et les stratégies de santé publiques mises en place. Publié sous l'égide de l'Institut de veille sanitaire (InVS qui deviendra en mai, l'Agence nationale pour la santé publique), ce bulletin édite les travaux de chercheurs issus de plusieurs institutions françaises, dont l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN). L'éditorial est co-signé du directeur général de l'InVS et de l'ancien directeur général de l'IRSN.
L'incidence des cancers de la thyroïde a nettement augmenté partout dans le monde depuis 25 à 30 ans. Les études, dont ce numéro du BEH se fait l'écho, montrent que cette augmentation a plusieurs origines. L'une des plus importantes est une augmentation du diagnostic de cancers de petite taille, qui n'évoluent pas, et celle des pratiques de diagnostic. D'autres facteurs sont suspectés, tels que l'exposition aux rayonnements ionisants, notamment via les pratiques d'imagerie médicale, en particulier pendant l'enfance.
Le rôle de l'accident de Tchernobyl sur l'incidence des cancers de la thyroïde est clairement établi dans les territoires d'Ukraine, de Biélorussie et de Russie où les populations ont été fortement exposées aux rejets d'iode radioactif. En France, les niveaux d'exposition ont été beaucoup plus faibles et le nombre de cas attribuables à cet accident se trouve probablement dans la fourchette des cas survenant spontanément ; ce raisonnement probabiliste n'apporte cependant pas de preuve irréfutable sur l'absence de cas en excès.
Pour contourner cette difficulté, le Japon a mis en place un dépistage systématique sur les enfants de la région de Fukushima. Cependant, cette démarche comporte un biais de « surdiagnostic », induisant des traitements ou interventions, dont certains sont apparus non justifiés. Sur la base de ces informations, et dans l'éventualité d'un accident nucléaire survenant en Europe, l'IRSN et l'InVS collaborent au sein du programme européen Shamisen pour définir la meilleure stratégie d'intervention à adopter. Associée à des mesures de prévention et de communication sur le risque radiologique, elle permettrait de minimiser les incertitudes sur l'exposition des populations et de réduire l'anxiété. Enfin, les instituts soulignent que les risques liés aux examens d'imagerie médicale et dentaire doivent être toujours mieux pris en compte.