Bilan des résultats de surveillance de l'environnement à la suite du rejet accidentel d'effluent liquide contenant de l'uranium à l'usine SOCATRI - Point à 19h30
Note d'information mise à jour le 11 Juillet 2008 à 19h30
A la suite du déversement accidentel d’une solution contenant de l’uranium, survenu dans la nuit du 7 au 8 juillet 2008 à l’usine SOCATRI sur le site nucléaire du Tricastin, un plan de surveillance de l’environnement a été mis en place dès le 8 juillet et s’est poursuivi les jours suivants.
Cette surveillance est réalisée à l’aide de prélèvements d’échantillons d’eaux de surface (rivières et plans d’eau) et de la nappe phréatique, au voisinage et en aval du lieu du rejet accidentel. L’analyse de l’uranium dans ces échantillons est ensuite effectuée en laboratoire. La plupart des prélèvements et des mesures ont été réalisés par l’exploitant de l’usine SOCATRI, dès le 8 juillet à 6h30, et ont été répétés régulièrement par la suite ; en complément, à des fins de vérification et pour approfondir son expertise, l’IRSN a envoyé des équipes d’intervention pour réaliser des prélèvements, analysés ensuite dans les laboratoires de l’IRSN :
1. une première campagne de prélèvements d’eau dans les cours d’eau en aval du rejet accidentel d’uranium (La Gaffière puis le Lauzon), ainsi que dans la nappe phréatique au plus près du lieu de déversement et en aval hydraulique, a été menée le 8 juillet 2008 après-midi par une équipe du Groupe d’intervention en radioprotection opérationnelle de l’IRSN, basé aux Angles près d’Avignon (voir note d’information IRSN du 8 juillet) ; les échantillons prélevés ont ensuite été acheminés vers les laboratoires de mesure accrédités de l’IRSN, situés au Vésinet, afin d’en assurer l’analyse (télécharger la note d'information sur les méthodes de mesure de l'uranium dans un échantillon d'eau) ; les résultats de ces analyses ont été obtenus le 10 juillet en cours de journée ;
2. une seconde campagne de prélèvements d’eau, également réalisés dans la nappe phréatique, notamment dans des puits de particuliers, et dans les cours d’eau sur une distance plus importante que le 8 juillet, a été menée le 9 juillet ; les échantillons prélevés ont été envoyés au Laboratoire de radioécologie et d’écotoxicologie de l’IRSN situé à Cadarache, qui a rendu ses résultats d’analyse le 10 juillet (mesures par la technique ICP-AES) ; de nouvelles mesures, plus précises (par la technique ICP-MS), ont été réalisées le 11 juillet sur les mêmes échantillons ;
3. enfin, une nouvelle campagne de prélèvements a été réalisée le 10 juillet par une équipe d’experts en radioécologie de l’IRSN. Outre de nouveaux prélèvements d’eau de surface et d’eaux souterraines destinés à suivre l’évolution de la concentration en uranium et dont les résultats de mesure ont été obtenus le 11 juillet, de nouveaux types de prélèvements ont été effectués lors de la campagne du 10 juillet :
- des sédiments et de végétaux aquatiques dans la Gaffière et le Lauzon ;
- des végétaux cultivés dans des exploitations agricoles ayant irrigué leurs parcelles le 8 juillet matin, avant l’arrêté d’interdiction de prélèvement d’eau pris le même jour dans l’après-midi.
En complément, une pêche de poissons dans le Lauzon a été réalisée le 11 juillet.
La recherche d’une présence éventuelle d’uranium, même en très faible concentration, dans ces prélèvements nécessite un traitement physique et chimique préalable des échantillons avant réalisation de la mesure, rendant impossible l’obtention des résultats dans des délais courts. Ces opérations seront menées au cours du week-end du 14 juillet, de manière à obtenir les résultats d’analyse mercredi 16 juillet.
Ces programmes de mesure successifs, complétant ceux de SOCATRI, visent trois objectifs principaux :
- évaluer, sur des bases quantifiées, l’impact du rejet accidentel sur les cours d’eau en aval du rejet (la Gaffière puis le Lauzon) ;
- surveiller le risque éventuel d’atteinte de la nappe phréatique à partir de ces cours d’eau ou du déversement direct de la solution uranifère dans le sol sur le site de SOCATRI ;
- apprécier l’atteinte éventuelle des ressources exploitées localement (eaux prélevées pour l’alimentation en eau potable, poissons, cultures irriguées).
Ces résultats permettent de tirer les informations suivantes :
- concernant les eaux de rivière (Gaffière et Lauzon), les valeurs obtenues par SOCATRI en début de matinée du 8 juillet montrent nettement l’influence du rejet accidentel survenu au cours de la nuit du 7 au 8 et sa propagation : à 6h30, la concentration en uranium dans l’eau est importante au niveau du point de rejet, et on observe également des concentrations élevées plus en aval, correspondant au déplacement de la vague de pollution provoquée par les rejets en cours de nuit ; dans la matinée du 8 juillet, les concentrations restent élevées dans le cours d’eau à l’intérieur du site, alors qu’elles deviennent plus basses et plus homogènes le long de la Gaffière et du Lauzon, immédiatement en aval ; en fin de journée du 8 juillet, les concentrations en uranium continuent de baisser (quelques dizaines de µg/L) mais s’observent sur l’ensemble de la rivière jusqu’à sa confluence avec le Rhône. Les mesures effectuées sur les prélèvements du 9 juillet montrent la poursuite de la diminution de la concentration en uranium dans la Gaffière à l’extérieur du site de SOCATRI et dans le Lauzon, avec des valeurs devenant inférieures à 10 µg/L à 19h. Les résultats obtenus sur les prélèvements du 10 juillet confirment cette tendance. Les mesures complémentaires réalisées par l’IRSN en des points similaires de ces rivières donnent des valeurs cohérentes et permettent ainsi de confirmer l’interprétation des résultats obtenus par SOCATRI ;
- concernant les plans d’eau (lieux de baignade et de pêche) situés à proximité de la Gaffière, les mesures réalisées les 8 et 9 juillet dans les 4 lacs (Les Girardes, les Mûriers, Trop Long et Bartras) donnent des valeurs conformes au bruit de fond habituel ;
- concernant les eaux de la nappe phréatique : les mesures ont été réalisées sur des points de prélèvements (piézomètres, captages d’eau potable ou d’irrigation, puits privés) au plus près du point de rejet et le long de la Gaffière et du Lauzon, afin de détecter un éventuel impact soit du déversement direct de la solution uranifère dans le sol à l’intérieur du site de SOCATRI, soit des cours d’eau pollués (phénomène de rechargement de la nappe). Sur l’ensemble des points de prélèvements ainsi surveillés, à l’exception de trois points (AEP4, PP4 et PP5), les valeurs mesurées du 8 au 10 juillet sont voisines de celles habituellement observées dans la nappe phréatique du sud-Tricastin ; la surveillance va être poursuivie afin de détecter une éventuelle propagation différée de l’uranium dans la nappe. Au point AEP4, situé à plus de 2 km au sud de SOCATRI, les mesures successives de SOCATRI et celles de l’IRSN montrent des valeurs variables dans le temps, jusqu’à environ 60 à 70 µg/L dans l’après-midi du 9 juillet ; les raisons de ces variations de concentration en uranium ne sont actuellement pas expliquées et des expertises supplémentaires sont en cours sur ce point singulier ; ces variations ne peuvent pas être expliquées par le rejet accidentel survenu le 8 juillet, compte tenu de la distance séparant ce point de la Gaffière (environ 300 m) et de la vitesse d’écoulement de l’eau de la nappe phréatique (quelques mètres par jour). Par ailleurs, aux points PP4 et PP5, les valeurs mesurées (sensiblement constantes entre 11 et 15 µg/L) sont plus élevées que celles habituellement observées dans la nappe phréatique du sud-Tricastin (entre 1 et 5 µg/L environ). Pour les mêmes raisons que précédemment, ces valeurs ne peuvent pas être expliquées par le rejet accidentel.
L’exploitant de l’usine SOCATRI va continuer la surveillance de l’environnement, dans le cadre d’un programme de prélèvements et d’analyse qui a été approuvé par l’autorité de sûreté nucléaire sur la base de l’avis de l’IRSN.
De son côté, l’IRSN va poursuivre la réalisation de campagnes de prélèvements et de mesures, avec deux objectifs complémentaires :
- assurer une vérification complémentaire sur les points les plus sensibles ou à la demande des autorités locales et nationales ;
- approfondir la connaissance des conséquences environnementales du rejet accidentel d’uranium, notamment pour préciser la connaissance du devenir de l’uranium rejeté et son éventuelle accumulation dans des milieux sensibles.
Les résultats des nouvelles mesures et des expertises de l’IRSN seront adressés aux autorités dès qu’ils seront disponibles et rendus publics.
Tous les éléments d'informations publiés par l'IRSN sont disponibles dans notre dossier : Incident à l'usine Socatri de Tricastin.