Biocinétique et toxicologie de l’uranium chez le rat après inhalations aiguës et répétées
Marjorie MONLEAU, thèse de doctorat de l'université de la Méditerranée (Aix-Marseille II) spécialité sciences de l'environnement et santé, 346p, soutenue le 9 décembre 2005.
L'uranium est un métal lourd naturel et radioactif, largement utilisé dans l'industrie nucléaire sous différentes formes chimiques et isotopiques. Son utilisation dans le cycle du combustible crée un risque d'exposition radiologique pour les travailleurs, essentiellement par inhalation de particules d'uranium. Selon la configuration du poste de travail, les contaminations à l'uranium peuvent être aiguës ou répétées, impliquer diverses formes chimiques et différents niveaux d'enrichissement et concerner un seul ou plusieurs composés. Les concepts et les modèles dosimétriques disponibles pour la radioprotection des travailleurs ainsi que la majorité des études sur les effets biologiques correspondent à des situations d'exposition aiguë. De plus les processus aboutissant aux effets pathologiques sont mal connus in vivo. Dans ce cadre, la principale question est de savoir si des expositions par inhalation répétée chez le rat induisent des cinétiques et une toxicité de l'élément, qui seraient différentes de celles observées après une exposition aiguë.
Dans cette étude, la comparaison des biocinétiques expérimentales et théoriques d'un uranium insoluble inhalé de manière répétée pendant trois semaines montre qu'une contamination chronique est correctement modélisée, excepté pour la rétention osseuse, par la somme d'incorporations aiguës successives et indépendantes. Par ailleurs, la cinétique d'un uranium soluble inhalé de façon ponctuelle peut être modifiée par l'exposition répétée à un uranium insoluble réalisée au préalable. Dans certains cas, une exposition à l'uranium pourrait donc modifier sa biocinétique lors d'expositions ultérieures.
Au niveau toxicologique, l'étude montre que les particules d'uranium inhalées de manière répétée induisent des perturbations comportementales et des effets génotoxiques qui se traduisent par des dommages de l'ADN de différentes natures, dans plusieurs types cellulaires et dépendant certainement de la quantité inhalée. Des expositions impliquant plusieurs composés uranifères entraîneraient un effet synergique. De plus, la répétition des inhalations aggrave les effets génotoxiques comparativement à une exposition aiguë.
Ce travail montre l'importance de ne pas négliger les effets de la répétition d'une exposition à l'uranium. Il donnera les bases à une amélioration du système de radioprotection qui permettra d'optimiser la surveillance des travailleurs du nucléaire. Dans un contexte plus large, ce travail participe à l'élargissement des connaissances sur la toxicité des particules.
Mots clés : uranium, particule, inhalation, rat, radioprotection, toxicologie, biocinétique, génotoxicité, double exposition