Le projet TRAJECTOIRE
Le projet TRAJECTOIRE, lancé en janvier 2020, vise à établir, aux exutoires des grands bassins versants français (Rhône, Loire, Seine, Garonne, Rhin, Meuse, Moselle), les trajectoires des contaminants apportés par l'Homme. Il s'agit d'étudier leur parcours, depuis leur introduction dans l'environnement, jusqu'à leur présence dans les compartiments environnementaux, au cours du 20ème siècle. Cette période a été rythmée à la fois par l'essor technologique et industriel puis par une prise en compte progressive de l'impact de cet essor sur l'environnement.
Caractéristiques du projet
- Dates de réalisation : 2020-2025
- Pilote : IRSN
- Financement : L'ANR finance ce projet, à hauteur de 642 000€, dans le cadre de son appel à projet générique de 2018 sur la thématique « Interactions Humains-Environnement ».
Contexte
Trois grandes familles de contaminants introduits dans l'environnement par les activités humaines seront étudiées dans le cadre du projet TRAJECTOIRE :
- Les radionucléides,
- Les micro-plastiques et leurs produits dérivés comme les phtalates,
- Les métaux critiques : des métaux ultra rares utilisés dans les technologies de pointes, comme le gadolinium, l'indium, le terbium, l'europium, le palladium, le platine ou le germanium.
L'objectif final du projet TRAJECTOIRE est de développer un modèle prédictif des concentrations de contaminants dans les systèmes fluviaux en considérant l'évolution des pressions anthropiques sur la base de scenarios. Les travaux de recherche permettront d'évaluer les trajectoires des contaminants étudiés, c'est à dire la réponse des environnements soumis aux perturbations anthropiques appliquées à leurs bassins versants, ainsi que la capacité des grandes rivières à revenir à leur état initial après une perturbation, c'est-à-dire leur résilience.
Le projet TRAJECTOIRE vise à fournir aux parties prenantes un outil d'aide à la décision sur l'interprétation des mesures environnementales, sur les modes de gestion des opérations de démantèlement et de remédiation ou encore sur les matériaux utilisables par les nouvelles technologies, dans la perspective de la protection des hydrosystèmes. Il est piloté par l'IRSN et regroupe 7 partenaires français.
À l'aube de la 4ème révolution industrielle, la transition énergétique ne peut exclure les questions et la prise de conscience liées à l'impact environnemental potentiel de l'utilisation des nouveaux matériaux.
Afin de connaitre le devenir des contaminants issus de ces matériaux, il est judicieux de s'intéresser à leurs trajectoires au sein des systèmes fluviaux. Les rivières sont le réceptacle final de nombreuses substances et leurs sédiments stockent la plupart d'entre elles, permettant de constituer des « archives sédimentaires » témoignant a posteriori de la nature et des niveaux de contamination de ces milieux.
En étudiant les trajectoires de certains contaminants utilisés par l'Homme au cours du 20ème siècle, en relation avec l'histoire de leur production, de leur gestion et de leur consommation, il possible d'identifier les liens de causalité et d'anticiper les futures trajectoires en fonction de choix politiques, économiques ou sociétaux.
Axes de recherche
Le projet TRAJECTOIRE s'organise autour de 5 groupes de travail (Work Packages ; WP). Deux d'entre eux (WP 1 et 5) sont dédiés à la coordination du projet de recherche et à l'intégration, la communication et la valorisation des résultats. Les WP 2, 3 et 4 sont respectivement dédiés à :
- L'analyse d'archives sédimentaires afin de reconstruire des séries temporelles sur les niveaux de contamination (WP2)
- La construction de frises socio-historiques retraçant les pressions anthropiques (WP3)
- L'analyse mathématique des corrélations entre les pressions anthropiques documentées par le WP 3 et l'évolution des niveaux de contamination relevés dans le WP 2, ainsi qu'à l'établissement d'un modèle prédictif des trajectoires des contaminants sur la base de scenarios.
Les WP
WP 2 : Reconstruction les niveaux de contamination aux exutoires des grands bassins versants français
Des carottes de sédiments seront prélevées aux exutoires des grands bassins versants français sur des zones déjà bien référencées (Rhône, Loire, Seine, Garonne) ou sur de nouveaux sites à identifier (Rhin, Meuse, Moselle). L'objectif est de considérer les pressions anthropiques et leurs conséquences sur la concentration en contaminants dans les sédiments à une grande échelle spatiale et d'échapper aux études de cas uniques qui limitent généralement les extrapolations. Les sites de carottage devront être caractérisés par un taux de sédimentation relativement continu et couvrir les 100 dernières années.
Ces sédiments seront datés, pour reconstituer les contaminations historiques des grands fleuves, selon trois méthodes : deux méthodes conventionnelles de datation par l'identification des pics de 137Cs, issus des retombées atmosphériques des essais nucléaires (1963) et de celles des retombées de l'accident de Tchernobyl, et par l'analyse des concentrations en excès du 210Pb.
La troisième méthode permet de dater les archives sédimentaires lorsque les données obtenues par les autres moyens de datation sont inefficaces. Celle-ci utilise la modélisation du code de calcul CASTEAUR de l'IRSN qui permet de calculer l'évolution, dans le temps et dans l'espace, de la répartition des radionucléides rejetés par les activités humaines.
L'analyse des sédiments comprendra la caractérisation des propriétés des particules, phase porteuse des contaminants, afin d'évaluer leur impact sur la variation des concentrations en contaminants.
Enfin les contaminants seront analysés le long des carottes de sédiments. La reconstitution historique des teneurs en contaminants sera établie sur la base de la datation des carottes de sédiments en considérant les facteurs de variabilité (teneurs en matière organique particulaire, granulométrie des particules). Afin de différencier les contaminants d'origine naturelle de ceux d'origine humaine et d'estimer l'évolution de l'impact anthropique au fil des ans, les concentrations en contaminants seront calculées en se référant à des niveaux de référence, qui représentent par exemple, dans le cas des métaux de haute technologie, la concentration naturelle des contaminants, présent dans les sols, qui devra être déterminée dans le cadre du projet. Dans le cas des radionucléides, les valeurs de référence seront des concentrations caractéristiques des sols des bassins versants, connues grâce aux relevés de l'IRSN; enfin, dans le cas des micro-plastiques, les valeurs de référence demeurent à préciser mais pourraient par exemple correspondre à des limites de quantification.
WP 3 : Frises socio-historiques
La construction des frises socio-chronologiques des contaminants se fera sur la base de documents d'archives concernant les méthodes et taux de production, l'utilisation et le stockage des matériaux contenant ces contaminants, ainsi que leur rejet dans l'environnement.
Elles contiendront des données qualitatives et semi-quantitatives sur les évolutions des réglementations relatives à ces contaminants et aux actions environnementales les concernant (recommandations, normes, interdiction de l'utilisation de substances, etc.) et sur l'évolution du patrimoine industriel et des pratiques de consommation des différentes régions des bassins versants étudiés.
Le projet TRAJECTOIRE utilisera en priorité les familles de contaminants et les bassins versants les mieux documentés afin d'alimenter le modèle mis au point dans le WP 4.
WP 4 : Analyses mathématiques et modélisation
Le WP 4 vise à mettre en relation les données quantitatives issues des archives sédimentaires du WP 2 et les données qualitatives et semi-quantitatives des frises socio-historiques créées par le WP 3 afin d'en dégager des liens de causalité.
Afin de réaliser cette analyse, le projet TRAJECTOIRE utilisera un réseau de neurones générés par le logiciel SNNS (Université de Stuttgart).
La première partie du WP4 servira à tester et améliorer la modélisation mathématique, construite par les réseaux de neurones, en l'appliquant aux ensembles de données les plus complets déjà disponibles.
L'objectif principal sera d'inclure des données qualitatives dans le réseau neuronal afin d'améliorer sa pertinence. Cet exercice devrait mettre en évidence les pressions qui ont le plus d'impact sur les concentrations des contaminants et constituer une version primaire des règles de fonctionnement (règles de reconnaissance), définissant les liens de causalités entre une perturbation d'origine humaine et les taux de concentration en contaminants en découlant.
La deuxième partie du WP 4 consistera à étendre le modèle aux autres bassins versants et contaminants étudiés. L'utilisation de ces données supplémentaires permettra d'améliorer le réseau neuronal en ajoutant d'autres règles de reconnaissance.
Le modèle ainsi validé pourra être utilisé sur des scénarios impliquant des actions perturbatrices ou des actions restauratrices afin d'estimer l'impact de ces actions sur la concentration en contaminants dans les dépôts sédimentaires et le temps nécessaire avant que cet impact soit perceptible.
Le projet TRAJECTOIRE vise ainsi à étudier en quoi les activités humaines peuvent influencer la résilience (ou l'absence de résilience) des bassins versants.
Partenaires
- IRSN (Institut de Radioprotection et Sûreté Nucléaire)
- EPOC (Environnements et Paléoenvironnements Océaniques et Continentaux ; Université de Bordeaux, CNRS)
- METIS (Milieux Environnementaux, Transferts et Interactions dans les hydrosystèmes et les Sols ; Sorbonne Université, CNRS)
- LEHNA (Laboratoire d'Ecologie des Hydrosystèmes Naturels et Anthropisés ; CNRS)
- LSCE (Laboratoire de Sciences du Climat et de l'Environnement ; CNRS, CEA)
- M2C (Morphodynamique Continentale et Côtière ; CNRS)
- MIO (Mediterranean Institute of Oceanography ; Université d'Aix-Marseille)
Les laboratoires impliqués
Laboratoires : LRTA
LRTA
Le LRTA mène des recherches dans le but de caractériser l'exposition des organismes vivants aux polluants issus des activités nucléaires (substances radioactives et substances chimiques stables associées) dans les bassins versants et les écosystèmes marins qui en constituent l'exutoire, que ce soit en situation de fonctionnement normal des installations ou en situation post-accidentelle.
Les résultats du projet
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