Savoir et comprendre
Résumé
Les conséquences sanitaires
21/05/2012
(Mise à jour) Pour un bilan actualisé en 2021, lire notre dossier « Tchernobyl, 35 ans après »
Les plus graves conséquences sur la santé ont été observées chez les opérateurs et les pompiers intervenus la nuit du drame, ainsi que chez les personnes impliquées les premiers jours, comme les pilotes d’hélicoptères, et chez les liquidateurs chargés du nettoyage du site et des alentours fortement contaminés.
Une trentaine de victimes ont ainsi décédé dans les quatre premiers mois, en raison principalement des fortes doses reçues responsables de l’apparition d’un syndrome d’irradiation aigue.
Par la suite, une vingtaine d’autres personnes sont décédées des séquelles de leur forte exposition ou de pathologies n’ayant pas de lien direct avec une exposition aux rayonnements ionisants (parmi lesquelles, tuberculose pulmonaire, cirrhose du foie ou arrêt cardiaque).
Sur la base des doses estimées, un excès de risque de leucémies était attendu chez les liquidateurs dans les 5 à 15 premières années suivant l’accident. Bien que des rapports récents suggèrent une augmentation de l’incidence des leucémies chez les liquidateurs de Biélorussie, Ukraine, Russie et pays Baltes, les études entreprises jusqu’à présent ne peuvent conclure de manière formelle en raison de leur faible puissance statistique, des incertitudes quant aux doses de radioactivité reçues et de l’existence de cofacteurs.
De nombreuses populations ont été soumises à des doses moyennes
Dès le début des années 1990, des médecins pédiatres de Belarus et d’Ukraine ont constaté une augmentation importante du nombre de cancers de la thyroïde chez de jeunes enfants.
Depuis, les études ont montré que cette augmentation est due essentiellement aux iodes radioactifs relâchés durant l’accident, l’incidence de ce cancer croissant avec la dose à la thyroïde. L’IRSN a participé à des études mettant en évidence l’augmentation de l’incidence de ce cancer pour plusieurs tranches d’âges : ce sont les enfants exposées aux jeunes âges, notamment ceux qui étaient âgés de moins de 10 ans au moment de l’accident, qui continuent à exprimer un risque élevé, même vingt cinq ans après l’accident. Pour la période 1991 - 2005, le nombre de cancers de la thyroïde en excès observés chez les enfants et adolescents qui avaient moins de 18 ans au moment de l’accident en Belarus, Russie et Ukraine est de 6848.
Quant aux cancers solides, ils ne semblent pas à ce jour être en excès dans les populations exposées.
Outre les cancers de la thyroïde, de très nombreuses études sur les liquidateurs ou sur des groupes de populations des trois républiques (Belarus, Russie et Ukraine) mentionnent des pathologies et effets non cancéreux. Parmi les survivants des 134 liquidateurs ayant présenté un syndrome d’irradiation aigue, les principales séquelles observables aujourd’hui sont des dégénérescences cutanées secondaires à des brûlures radiologiques et des cataractes. Pour ce qui concerne les autres pathologies évoquées telles que les maladies cardio-vasculaires, les anomalies chromosomiques, les déficits du système immunitaire, les effets sur la reproduction ou les effets psychologiques, aucun lien de cause à effet avec l’exposition aux rayonnements ionisants n’a pu être établi.
Mais la question reste ouverte, les études mentionnant ces autres pathologies ayant toutes été contestées. Bien qu’une étude russe évoque une augmentation de la mortalité par maladies cardiovasculaires et de l’incidence de maladies cérébrovasculaires chez les liquidateurs, la seule étude où il existe sans ambiguïté une relation entre les pathologies cardio-vasculaires et les rayonnements ionisants reste l’étude de la cohorte des survivants d’Hiroshima et de Nagasaki.
Les fortes doses reçues et leurs effets
Lors de l’accident de Tchernobyl, deux décès par traumatisme physique, brûlure thermique et effet des rayonnements ont eu lieu dans les toutes premières heures.
Le syndrome d’irradiation aiguë Les symptômes initiaux de l’irradiation aiguë sont : nausée, vomissement, diarrhée, fièvre, céphalée, érythème. Le premier indicateur de sévérité du syndrome est le délai d’apparition, l’intensité et la durée de ces symptômes. Ce syndrome est observé à partir de doses supérieures à 1 Gy. Ces doses entraînent, dans les semaines qui suivent, une destruction plus ou moins importante des cellules de la moelle osseuse (aplasie médullaire). Celle-ci est à l’origine d’une diminution du nombre de globules sanguins. Ce syndrome d’atteinte de la moelle osseuse exige des soins adaptés : transfusion, facteur de croissance, greffe. Au-delà d’une certaine dose, toute thérapeutique est vaine, car il apparaît d’autres syndromes, tels que l’atteinte irréversible du système digestif ou du système nerveux central. |
Les personnels de la centrale et les équipes de secours présents sur le site pendant les premières heures de l’accident, au nombre de 600 environ, ont subi une irradiation aiguë. Elle provenait des fragments du réacteur éparpillés sur le site, du nuage et des dépôts radioactifs. Chez ces premiers intervenants, 237 furent hospitalisés.
Un syndrome d’irradiation aiguë a été confirmé chez 134 de ces intervenants. Pour 41 d’entre eux, les doses étaient inférieures à 2,1 Gy ; pour les 93 autres, les doses étaient supérieures et ce jusqu’à 16 Gy pour certains. Dans les quatre mois qui ont suivi l’accident, 28 d’entre eux sont décédés. Dans la période 1987-2006, 19 autres intervenants sont décédés des séquelles de leur syndrome, dont 10 avant 1997, 4 avant 2000 et 5 jusqu’en 2006.
Les pilotes et équipages d’hélicoptères, au nombre de 1125, ont été mis à contribution dès les premiers jours pour lutter contre le feu et les rejets radioactifs en déversant des tonnes de matériaux sur le réacteur accidenté. Les doses reçues par ces pilotes ont été calculées : leur moyenne est de 0,26 Gy. Ceux dont les doses étaient supérieures à la moyenne furent hospitalisés pour des examens médicaux.
Les ‘liquidateurs’ sont les personnes civiles et militaires qui sont intervenues sur le site de la centrale ou dans les lieux les plus contaminés de la zone d’exclusion des 30 km. Ils ont effectué des travaux auprès du réacteur, décontaminé le site et ses environs et participé à la construction du sarcophage. De 1986 à 1987, 226 000 liquidateurs ont été employés. Leur nombre a augmenté ensuite en fonction des travaux de réhabilitation. Au total, ils sont au nombre de 600 000 environ sur la période 1986-1990. Leurs expositions sont plus faibles que celles du petit groupe des premiers intervenants : en moyenne de 0,1 Sv et jusqu’à 0, 5 Sv. La littérature scientifique ne fait pas mention d’effets aigus au sein de cette population.
Un troisième groupe de travailleurs exposés est constitué par des personnels de l’Institut Kourchatov qui sont intervenus après l’accident pour suivre des travaux de réhabilitation et contrôler la radioactivité. Les doses individuelles sont en majorité inférieures à 0,25 Sv, quelques unes dépassent 1 Sv.
Note : le résumé ci-dessus reflète les chiffres publiés. Certains observateurs considèrent que les doses ont été minimisées, notamment celles des liquidateurs les plus exposés, par exemple ceux qui ont nettoyé le site même de la centrale Lénine de Tchernobyl.
Risque de leucémies chez les liquidateurs
Sur la base des doses estimées et des connaissances des effets des rayonnements ionisants, un excès de risque de leucémies était attendu chez les liquidateurs de Tchernobyl dans les 5 à 15 premières années suivant l’accident.
Bien que des rapports récents suggèrent une augmentation de l’incidence des leucémies chez les liquidateurs de Biélorussie, Ukraine, Russie et pays Baltes, les études entreprises jusqu’à présent ne peuvent conclure de manière formelle en raison de leur faible puissance statistique, des incertitudes quant aux doses de radioactivité reçues et de l’existence de cofacteurs. Un effet massif est semble t-il donc a priori exclu. Ceci pourrait s’expliquer soit par une surestimation du risque attendu initialement, soit par les limites méthodologiques des études conduites jusqu’à présent. Des études sont en cours dans le cadre de collaborations internationales. Elles devraient permettre de vérifier si les leucémies observées dans certaines régions ou dans certains groupes de populations, notamment les liquidateurs, sont imputables aux expositions aux rayonnements ionisants.
La leucémie : un indicateur privilégié de risque radio-induit
Chez les survivants des bombardements de Hiroshima et de Nagasaki, un excès de risque de leucémies a été observé dès la première décade après l’explosion. De plus, l’excès de risque par unité de dose apparaît beaucoup plus élevé pour les leucémies que pour les autres types de cancers.
C’est pourquoi la leucémie a été considérée comme un indicateur privilégié du risque potentiel à long terme des conséquences sanitaires de l’accident de Tchernobyl [Bard et al 1997]. Si les résultats obtenus chez les survivants des bombardements de Hiroshima et Nagasaki étaient transposables aux individus exposés du fait de l’accident de Tchernobyl, alors :
- le risque principal attendu dans les 10 à 15 années suivant l’accident était un excès de leucémie
- l’excès de risque de leucémies prédit dans les 10 premières années suivant l’accident chez les liquidateurs était de près de 80% [Cardis et al. 1996]
- la mise en évidence d’un tel excès de risque par un suivi épidémiologique des liquidateurs était a priori tout à fait possible [Cardis et al. 2001].
Études du risque de leucémies chez les liquidateurs de Tchernobyl
Un suivi épidémiologique des liquidateurs a été mis en place dans les années 1990 dans différents pays. Plusieurs études de cohortes de liquidateurs ont été effectuées ; au total, elles concernent plus de 100 000 individus (environ 10 000 liquidateurs baltes (Estonie, Lituanie, Lettonie), 40 000 biélorusses, 60 000 russes).
Néanmoins, la qualité de ces études a été très discutée, en particulier :
- la validation des données (vérification des diagnostics, imprécision des estimations de doses)
- le suivi des individus (critères de définition du statut « liquidateur », pourcentages importants d’individus perdus de vue).
Ces restrictions méthodologiques et ces incertitudes limitent l’interprétation des résultats de ces études.
En 1997, une analyse de la cohorte des liquidateurs estoniens n’a pas montré d’augmentation du risque de leucémie, mais le suivi s’arrêtait en 1993. [Rahu et al 1997].
Une première analyse des données des liquidateurs russes a été publiée en 1997 [Ivanov et al. 1997]. Elle indique une relation entre la dose et le risque de leucémies, avec un excès par unité de dose très élevé (excès de risque relatif par Gy = 4,3 ; intervalle de confiance à 95%=[0,8 – 7,8]) similaire à celui estimé chez les survivants d’Hiroshima et de Nagasaki. Néanmoins, cette étude a été très critiquée, en particulier pour ce qui est de la validité des diagnostics des leucémies [Cardis et al. 2001]. En outre, ce résultat n’a pas été confirmé par la suite.
En 2000, une étude a été effectuée spécifiquement sur le risque de leucémies au sein de cette même population. Elle portait au total sur 41 cas observés entre 1988 et 1995. Les auteurs notaient une augmentation du risque par rapport à la période avant 1988, cette augmentation de risque étant plus élevée après exclusion des leucémies lymphoïdes chroniques (type de leucémie considéré comme non radio-induit). Mais comme les incertitudes statistiques associées étaient très larges, ces observations ne permettaient pas de conclure à la mise en évidence d’un risque radio-induit de leucémies [Konogorov et al 2000].
Une analyse récente de la mortalité des liquidateurs estoniens et lettons a été effectuée sur plus de 10 000 individus [Rahu et al 2006]. Les auteurs notaient un niveau élevé de mortalité par leucémies, mais ce résultat était basé seulement sur 7 décès, et non statistiquement significatif.
Bilan et perspectives
En conclusion, le risque de leucémies radio-induites chez les liquidateurs de Tchernobyl n’est pas démontré aujourd’hui. Il est possible que les doses à la moelle osseuse (l’organe cible pertinent pour ce qui est du risque de leucémie) aient été surestimées, comme le suggère une étude de 1998 [Littlefield et al 1998]. Dans ce cas, le risque attribuable aux conséquences de Tchernobyl pourrait être plus faible qu’initialement attendu.
Les limites méthodologiques des études conduites ont aussi pu masquer un éventuel excès de leucémies (critères de définition du statut « liquidateur », difficulté d’effectuer un suivi de qualité sur des populations de très grande taille, larges incertitudes sur les doses individuelles, validité des diagnostics [Gluzman et al 2005]).
Des études cas-témoins ont également été conduites sur ces populations de liquidateurs. Ce type d’approche épidémiologique permet une meilleure validation des diagnostics et de la reconstitution des doses individuelles. Par contre, il porte généralement sur des effectifs faibles, ce qui réduit la capacité à montrer une relation dose-effet, si celle ci existe.
Pour y remédier, des travaux coordonnés par le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) ont été lancés. Une étude portant sur les cas de leucémies des cohortes de liquidateurs baltes, biélorusses et russes est en cours [Kesminiene et al 2002]. Un effort similaire est conduit en parallèle par le National Cancer Institute (NCI, USA) sur les liquidateurs ukrainiens.
Les résultats de ces études devraient permettre d’apporter une réponse plus fiable à l’existence ou non d’un risque de leucémies radio-induit chez les liquidateurs de Tchernobyl.
Cancers de la thyroïde
Dès le début des années 1990, des médecins pédiatres de Belarus et d’Ukraine ont constaté une augmentation importante du nombre de cancers de la thyroïde chez de jeunes enfants.
Normalement, les cancers de la thyroïde sont très rares chez les enfants : de l’ordre de 1 cas pour un million d’enfants par an. Le diagnostic de quelques cas, simultanément dans plusieurs villes, et sur une courte période, a déclenché l’alerte.
Depuis, de nombreuses études ont été menées pour étudier l’évolution de cette maladie dans le temps, en fonction du niveau d’exposition, et en fonction de l’âge au moment de l’accident. Les publications récentes de Cardis et al. (2005) et de Jacobs et al. (2006), bien que reposant sur des méthodologies différentes, proposent des conclusions comparables : l’augmentation importante des cancers de la thyroïde chez les enfants et jeunes adolescents est due essentiellement aux iodes radioactifs relâchés durant l’accident, l’incidence de ce cancer croissant avec la dose à la thyroïde.
L’IRSN a participé à des études mettant en évidence l’augmentation de l’incidence de ce cancer pour plusieurs tranches d’âges : ce sont les enfants exposées aux jeunes âges qui continuent à exprimer un risque élevé, même vingt cinq ans après l’accident.
Dans les zones contaminées de Belarus, Ukraine et Russie
Au Belarus, un registre national des cancers existait bien avant l’accident de Tchernobyl. En Ukraine et dans certains oblasts (régions administratives) de Russie, des registres de cancers ont été mis en place progressivement après l’accident. L’évolution du cancer de la thyroïde dans le temps, et en fonction de l’âge au moment du diagnostic a donc pu être étudiée sur des périodes plus ou moins longues.
Seules les données du registre de Belarus permettent de déterminer le taux de cancer national avant l’accident. La période 1986-1990 peut être considérée comme un temps de latence minimum pour qu’un excès de cancer puisse être détecté au niveau national. L’IRSN a participé à la mise en place et à la validation des données sur les cancers de la thyroïde en organisant des vérifications histologiques au niveau international avec des collaborateurs ukrainiens et biélorusses [Franc et al. 2003].
L’évolution des cancers de la thyroïde doit être considérée en trois étapes :
- la période avant l’accident,
- la période intermédiaire où s’est mise en place un système de dépistage plus systématique et plus performant,
- la période postérieure où l’excès de cancer s’exprime en fonction de l’âge atteint, et rétrospectivement, en fonction de l’âge à l’exposition.
Elle apparaît sur le graphique suivant, issu du Projet Santé de l’Initiative franco-allemande coordonné par l’IRSN.
Augmentation des cancers de la thyroïde en Belarus (âge au moment du diagnostic)
Source : IFA et registre national des cancers au Belarus
Ce graphique illustre plusieurs faits :
- avant l’accident de Tchernobyl, le nombre de cancers de la thyroïde chez les enfants de moins de 15 ans était très faible (voir période 1980-86). Après un temps de latence court (environ 4 ans), ce nombre a augmenté rapidement au début des années 90, pour atteindre un maximum vers les années 1995-1996 ;
- parallèlement, une augmentation des cancers chez les adolescents et jeunes adultes est observée ; dans le groupe d’âge 15-29 ans, cette augmentation est particulièrement importante à partir de l’année 2000, période où ceux qui avaient moins de 5 ans en 1986 intègrent le groupe d’âge 15 ans et plus ;
- par contre en 2000, le taux d’incidence des enfants de moins de 5 ans est redevenu proche de celui observé avant l’accident ; la radioactivité résiduelle existant dans certaines régions de Belarus ne semble donc pas induire d’excès de cancer de la thyroïde chez les jeunes ;
- jusqu’en 2001, c’est environ 1800 cancers de la thyroïde qui ont été observés chez les enfants et adolescents âgés de moins de 15 ans au moment de l’accident.
La conclusion principale est la suivante : le risque de cancers de la thyroïde après exposition aux jeunes âges continue à s’exprimer vingt ans après Tchernobyl. La surveillance de ces cancers doit donc être poursuivie. Des résultats similaires ont été observés sur les adolescents et jeunes adultes en Ukraine et dans certains oblasts fortement contaminés de Russie.
D’autres études, notamment celle de P. Jacobs et al. 2006 menée sur les enfants exposés, donnent des résultats analogues : l’augmentation des cancers de la thyroïde observée dans les régions contaminées d’Ukraine et de Belarus obéit à une relation dose-effet comparable à celle déjà publiée dans une méta-analyse (i.e. analyse des données de plusieurs études simultanément) effectuée par Ron et al. en 1995. En d’autres termes, l’excès de risque dû aux iodes radioactifs rejetés lors de l’accident de Tchernobyl est comparable à celui qui avait été observé sur diverses populations d’enfants ayant eu des expositions impliquant uniquement une irradiation externe.
L’étude cas-témoin publiée par Cardis et al. en 2005 confirme également que l’excès augmente avec la dose à l’organe (dose impliquant essentiellement les iodes radioactifs, mais où il est tenu compte également de l’irradiation externe et du césium incorporé). Cette étude indique aussi que :
- le risque de cancer de la thyroïde diminue si de l’iode stable a été administré,
- et ce même après un laps de temps de plusieurs jours,
- et que le risque augmente en cas de déficience d’iode au moment de l’exposition.
Pour les populations exposées aux âges adultes, une augmentation éventuelle du risque de cancers de la thyroïde est difficile à mettre en évidence. En effet, d’autres facteurs, comme de meilleures techniques de dépistage appliquées préférentiellement dans les zones contaminées durant les 10 dernières années, peuvent contribuer en partie à l’excès observé pour certaines tranches d’âges chez les femmes.
Le cancer de la thyroïde peut être induit par des facteurs multiples qui en général, ne sont pas tous contrôlés dans les études effectuées. Mais il n’y a plus de doute sur l’excès très important des cancers de la thyroïde chez les jeunes enfants et adolescents âgés de moins de 18 ans au moment de l’accident. À ce jour, un nombre de 6848 cas en Belarus, Russie et Ukraine est évoqué chez les enfants âgés de moins de 18 ans au moment de l’accident pour la période 1991 – 2005.
En France
Une première évaluation du risque de cancer de la thyroïde en France a été publiée en 2000 par l’IRSN et l’InVS (Rapport IPSN-InVS, Décembre 2000). Les travaux ont été poursuivis à l’IRSN pour quantifier les différentes sources d’incertitudes et prendre en compte le fait que les taux de base de l’incidence des cancers de la thyroïde en France évoluaient.
Ces travaux ont abouti à trois publications dans des revues scientifiques internationales entre 2003 à 2005 (voir références). Les résultats confirment l’ordre de grandeur des premières estimations. Ils illustrent également le fait que les incertitudes associées à l’estimation du taux de base de l’incidence des cancers de la thyroïde sont très supérieures au niveau de risque que l’on peut attribuer aux retombées de Tchernobyl en France.
Pathologies et effets non cancéreux
De très nombreuses études sur les liquidateurs ou sur des groupes de populations des trois républiques (Belarus, Russie et Ukraine) mentionnent des pathologies et effets non cancéreux. Ces pathologies sont les cataractes, les maladies cardio-vasculaires, les anomalies chromosomiques, les déficits du système immunitaire, les effets sur la reproduction, les effets psychologiques.
Les études sur les liquidateurs ne permettent pas de trancher
Tous les liquidateurs ne sont pas suivis en continu, beaucoup ont été perdus de vue, mais il existe néanmoins un suivi de certains sous-groupes. Parmi les études disponibles, certaines présentent des résultats positifs, d’autres des résultats négatifs, d’autres des résultats intermédiaires (cas des groupes suivis au cours du temps), d’autres encore des résultats non cohérents avec ceux publiés antérieurement dans la littérature scientifique à comité de lecture.
Pour ce qui concerne la mortalité cardio-vasculaire, les études effectuées en Belarus et Ukraine reposent sur des effectifs trop faibles. En Russie, E. Ivanov et al. (2000) ont constaté un excès significatif au sein d’une cohorte de 60 910 liquidateurs russes, mais ce résultat a été critiqué et demande à être confirmé sur une période de suivi plus longue notamment.
Populations vivant sur les territoires contaminés
Pour ces populations, on dispose de quelques études isolées dont les résultats n’ont pour la plupart pas été validés par des publications dans des revues scientifiques internationales à comité de lecture. Il s’agit en particulier des travaux menés par le Professeur Y. Bandazhevsky à l’Institut Médical de Gomel (Belarus) avec notamment la collaboration du Professeur V. Nesterenko de l’Institut de Radioprotection Belrad de Minsk (Belarus).
Ces auteurs suggèrent que les enfants vivant dans le Sud de la Biélorussie présenteraient des troubles divers :
- des pathologies cardiaques caractérisées par une hypertension artérielle et une tachycardie (augmentation du rythme cardiaque) ;
- fatigue, dyspnée d’effort et insuffisance cardiaque pouvant conduire à une mort subite ;
- déficits du système immunitaire ;
- anémies ;
- ulcères gastroduodénaux ;
- cataractes résultant d’une opacification du cristallin.
Les observations faites sur les liquidateurs et les populations d’enfants de Belarus demandent à être confirmées.
En conclusion, la question de l’existence des pathologies autres que les cancers après Tchernobyl est ouverte. La seule étude où il existe sans ambiguïté une relation entre les pathologies cardio-vasculaires et les rayonnements ionisants reste l’étude de la cohorte des survivants d’Hiroshima et de Nagasaki [Preston et al. ,2003].
En savoir plus sur les effets des fortes doses :
- Rapport UNSCEAR 2000, Sources and Effects of Ionizing Radiation, Vol II, Annex D : Health effects due to radiation from the Chernobyl accident
- Rapport IRSN : Tchernobyl 17 ans après
Références bibliographiques sur les risques de leucémies chez les liquidateurs.
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- Gluzman D, Imamura N, Sklyarenko L, Nadgornaya V, Zavelevich M, Machilo V. Malignant diseases of hematopoietic and lymphoid tissues in Chernobyl clean-up workers. Hematol J. 2005; 5: 565-71.
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- Kesminiene A, Cardis E, Tenet V, Ivanov VK, Kurtinaitis J, Malakhova I, Stengrevics A, Tekkel M. Studies of cancer risk among Chernobyl liquidators: materials and methods. J Radiol Prot. 2002; 22: A137-41.
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Références bibliographiques sur les cancers de la thyroïde dans les pays de l’Est
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- Catelinois O, Laurier D, Verger P, Rogel A, Hémon D, Tirmarche M. Uncertainty and sensitivity analysis in thyroid cancer risk assessment related to the Chernobyl accident fallout in France. Risk Analysis 2005; 25: 243-252.
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Références bibliographiques sur les pathologies et effets non cancéreux :
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