Coccinelle : Cohorte sur le risque de cancer après cardiologie interventionnelle pédiatrique
Les cardiopathies congénitales chez les enfants sont généralement diagnostiquées et traitées par des techniques de cardiologie interventionnelle. Le recours à ces techniques a fortement augmenté ces dernières années (Le Tourneau et al.[1], 2002, Van Aerschot et al., 2012[2]) car elles permettent, dans certains cas, de supplanter la chirurgie et donc de réduire considérablement les complications postopératoires, les coûts des hospitalisations et d'améliorer la survie des enfants. Si ces techniques de cardiologie interventionnelle ont permis des progrès incontestables dans le diagnostic et le traitement des cardiopathies chez les enfants, elles nécessitent de surveiller l'acte de cathétérisme par imagerie radiologique, engendrant par conséquent une exposition aux rayonnements ionisants chez le jeune patient. Généralement, le niveau des doses délivrées lors de ces procédures de cardiologie interventionnelle est supérieur à celui associé aux autres types de procédures utilisées en radiologie diagnostique (Onnash et al., 2007[3]). Or, le risque de survenue de cancer après une exposition aux rayonnements ionisants est plus élevé si l'exposition a été reçue pendant l'enfance qu'à l'âge adulte (Unscear, 2006[4]). Il est donc important de s'intéresser aux effets au cours de la vie des irradiations médicales reçues durant l'enfance.
Objectif
L'objectif général de l'étude Coccinelle (Cohorte sur le risque de cancer
après cardiologie interventionnelle pédiatrique) est d'évaluer le risque de cancer solide et de leucémie associé à l'exposition aux rayonnements ionisants lors de procédures de cardiologie interventionnelle réalisées durant l'enfance. L'étude Coccinelle contribuera à améliorer les connaissances sur les risques radio-induits par des expositions reçues pendant l'enfance et à apporter des éléments de réponse sur la variabilité individuelle du risque de cancer, plus particulièrement sur l'effet de l'âge à l'exposition, question de recherche majeure dans le domaine de l'épidémiologie des rayonnements ionisants.
Description
La cohorte Coccinelle inclut des enfants âgés de moins de 16 ans ayant bénéficié d'au moins une procédure de cardiologie interventionnelle entre 2000 et 2013 et recrutés à partir de 15 services de cardiologie pédiatrique ayant une activité de cardiologie interventionnelle en France métropolitaine (Baysson et al., 2013 ; Baysson et al., 2015). Les données collectées concernent l'identification du sujet (date de naissance, poids, taille), les caractéristiques de la procédure de cardiologie interventionnelle (date, pathologie, type de procédure) et les paramètres techniques nécessaires à la reconstitution des doses reçues par les patients (temps de fluoroscopie, Produit Dose Surface (PDS)). Des données complémentaires issues du Programme de Médicalisation des Systèmes d'Information (PMSI) relatives au séjour hospitalier (date du séjour, diagnostics principal et associés…) sont également disponibles. Le suivi de la cohorte à long terme repose sur une mise à jour périodique de l'état de santé des enfants en termes de survenue de cancer et de leucémie, à partir des données du Registre national des cancers de l'enfant (RNCE) jusqu'à l'âge de 18 ans et du Système National des Données de Santé (SNDS) au-delà.
Principaux résultats
Fin 2020, la cohorte Coccinelle inclut 15 410 enfants (51 % de garçons) ayant reçu un total de 20 125 procédures de cardiologie interventionnelle. La majorité des enfants (82 %) n'a reçu qu'une seule procédure et 38 % des enfants avaient moins de 1 an lors de leur première procédure. Les enfants sont suivis jusque fin 2015, ce qui correspond à une durée de suivi moyenne de 5 ans. Dans un premier temps, le croisement avec le RNCE permettra de connaître le nombre de cancers diagnostiqués.
Concernant l'estimation de la dose reçue au cours des procédures de cardiologie interventionnelle, un premier travail avait permis d'analyser les informations dosimétriques (PDS, temps de scopie, nombre d'images) pour 801 procédures réalisées sur la période 2010-2011. Parmi ces procédures, 288 (36 %) étaient à visée diagnostique et 513 (64 %) étaient à visée thérapeutique. Les résultats de cette analyse, publiés dans Pediatric Cardiology (Barnaoui et al., 2014) montraient une dispersion importante des doses pour un même type de procédure au sein d'un même centre. L'estimation de la dose pour l'ensemble de la cohorte est en cours.
Perspectives
Au niveau international, l'étude Coccinelle est intégrée dans le projet européen HARMONIC (2019-2024), coordonné par ISGlobal (Espagne). HARMONIC a pour objectif de mieux comprendre les effets à long terme de l'exposition médicale aux rayonnements ionisants chez les enfants, en particulier chez les enfants ayant un cancer traité par des techniques modernes de radiothérapie ou chez les enfants ayant reçu une exposition aux rayons X lors d'une procédure de cardiologie interventionnelle (https://harmonicproject.eu/).
Le projet de recherche Coccinelle a été autorisé par la Cnil (Commission Nationale Informatique et Libertés) en 2011 (autorisation n°911112) et a obtenu un Décret en Conseil d'Etat pour l'utilisation des données du Système National des Données de Santé en 2016 (Décret au Journal Officiel n°2016-1103 du 11 août 2016).
Financements : IRSN, INCa (Institut National du Cancer), Ligue Nationale contre le Cancer.
Information CNIL pour les personnes incluses dans l'étude Coccinelle Conformément aux dispositions des articles 15 à 21 du règlement général sur la protection des données (RGPD), vous disposez d'un droit d'accès, de rectification, de limitation du traitement, d'effacement ou de portabilité des données vous concernant ou concernant votre enfant. Vous disposez également d'un droit d'opposition au traitement ou à la transmission des données vous concernant ou concernant votre enfant. En cas d'opposition, les données vous concernant cesseront de faire partie de l'étude et seront détruites. Vous pouvez exercer ces droits auprès du délégué à la protection des données de l'IRSN à l'adresse e-mail : donnees.personnelles@irsn.fr |
[1] Le Tourneau T, Blanchard D, Lablanche JM, Monassier JP, Morice MC, Cribier A, et al. Evolution of interventional cardiology in France during the last decade (1991-2000). Arch Mal Coeur Vaiss 2002; 95(12):1188-1194.
[2] Van Aershot I, Boudjemline Y. (2012) Cathétérisme interventionnel et chirurgie cardiaque chez les enfants. Archives de Pédiatrie 2012; 19 :96-102.
[3] Onnasch, D. G. W., Schröder, F., Fischer, G. and Kramer, H.-H. Diagnostic reference levels and effective dose in paediatric cardiac catheterization. Br. J. Radiol 2007; 80:177–185.
[4] United Nations Scientific Committee on the Effects of Atomic Radiation (UNSCEAR) 2006 UNSCEAR 2006 Report—Effects of Ionizing Radiation Annex A: United Nations (New York:United Nations)
Références
- Baysson H, Réhel JL, Boudjemline Y, Petit J, Girodon B, Aubert B, Laurier D, Bonnet D, Bernier MO. Risk of cancer associated with cardiac catheterization procedures during childhood: a cohort study in France. BMC Public Health 2013; 13(1):266.
- Baysson H, Nkoumazok B, Barnaoui S, Réhel JL, Girodon B, Milani G, Boudjemline Y, Bonnet D, Laurier D, Bernier MO. Follow-up of children exposed to ionizing radiation from cardiac catheterisation: the Coccinelle study. Radiat Prot Dosimetry 2015; 165(1-4):13-16.
- Barnaoui S, Réhel JL, Baysson H, Boudjemline Y, Girodon B, Bernier, MO, Bonnet D, Aubert B. Local reference levels and organ doses from pediatric cardiac interventional procedures. Pediatric Cardiology, 2014, 35(6):1037-1045