L'accident d'irradiation d'Istanbul : comparaison de trois dosimètres cytogénétiques pour l'expertise biologique
I. Sorokine-Durm, M. Delbos, V. Durand, N. Paillole, A. Le Roy et P. Voisin Congrès SFRP, Tours 19-21 juin 2001
En 1998, deux containers de transport de source de 60Co à usage médical devant partir en réforme furent transférés de Ankara à Istanbul et entreposés dans un bâtiment inoccupé pendant près de 9 mois. Ces containers furent alors vendus par erreur à des ferrailleurs d'Istanbul qui commencèrent à les démanteler dans une zone résidentielle et furent ainsi irradiés. Ce n'est que trois semaines plus tard que la situation fut comprise et une irradiation aiguë fut alors diagnostiquée chez 10 adultes dont 5 eurent pendant 1 2 mois les symptômes cliniques correspondant. Dès la découverte de l'accident, l'AIEA fit appel à quatre laboratoires experts en dosimétrie biologie, dont le Laboratoire de Dosimétrie Biologique Multiparamétrique (LDBM) de l'IRSN, pour l'analyse cytogénétique du sang provenant de ces patients. Les échantillons sanguins provenant des 5 personnes turques les plus atteintes furent transportés à l'IRSN et traités pour l’analyse de trois paramètres biologiques, dans les lymphocytes circulants mis en culture : (1) la fréquence des aberrations chromosomiques radio induites instables (dicentriques, anneaux centriques et fragments) par la technique conventionnelle, après coloration homogène des chromosomes (FPG) ; (2) la fréquence des aberrations chromosomiques stables (translocations, insertions) observées après un marquage fluorescent spécifique, «peinture chromosomique», de trois paires de chromosomes (2, 4 et 12) ; (3) le test des micronoyaux. Toutes les données obtenues furent comparées aux courbes de référence établies au laboratoire après irradiation de sang in vitro (6OCo, débit de dose de 0,5 Gy.min-1). Les estimations de dose obtenues par les trois approches sont de l'ordre de 1 3 Gy pour l'ensemble des patients. Celles obtenues après FISH peinture apparaissent légèrement supérieures aux doses estimées par le dénombrement des dicentriques (exposition en mode aigu). Ces doses sont plus proches des doses « dicentriques » calculées en mode chronique (7 heures, mode qui correspond à la situation réelle) que de celles estimées en mode aigu. Le comptage des micronoyaux a donné une estimation de dose en accord avec les deux autres techniques. Le retour d'expérience de cette irradiation accidentelle montre que les trois tests cytogénétiques sont très homogènes et que leurs avantages et inconvénients respectifs les rendent complémentaires plus que supplétifs.