Savoir et comprendre

Les caractéristiques générales de l'EPR

03/05/2024

C’est un réacteur puissant d’une capacité de production de plus de 1 600 MWe contre 1 450 MWe pour les derniers réacteurs construits en France (de type N4). Il est conçu pour une durée de fonctionnement de 60 ans.

 

Vue générale du réacteur EPR

L’EPR est un réacteur dit « évolutionnaire », c’est-à-dire que sa conception repose sur celle des réacteurs existants, les réacteurs nucléaires de type N4 français et Konvoi allemands. Il bénéficie ainsi de technologies éprouvées et du retour d’exploitation de ces prédécesseurs. Il s’inscrit dans les réacteurs de troisième génération.

Classement des centrales nucléaires en France - La chronologie des différentes générations de réacteurs est associée à la date de maturité des technologies permettant le déploiement à une échelle industrielle.

Des évolutions importantes ont toutefois été introduites par rapport aux réacteurs existants afin de :

  • renforcer la prévention des accidents, en particulier des accidents pouvant résulter de défaillances multiples ;
  • amélioration de la gestion des accidents de perte d’alimentation électrique et d’eau de refroidissement ;
  • limiter les conséquences possibles d’un accident avec fusion du cœur du réacteur
  • mieux protéger l’installation des effets des agressions internes et externes.

Prévention des accidents

Un ensemble d’évolutions du projet EPR par rapport aux réacteurs en fonctionnement visent à réduire la probabilité d’un accident et notamment avec fusion du cœur :

  • la mise en œuvre d’un système de limitation permettant d’éviter l’arrêt d’urgence pour certains transitoires ;
  • un plus grand niveau de redondance, de diversification et de séparation physique des systèmes de sauvegarde (cf. paragraphe plus bas) ;
  • une augmentation des délais de grâce pour les opérateurs en situation accidentelle par l’augmentation des volumes de certains composants du circuit primaire ;
  • une évolution de l’interface entre les systèmes de conduite et les opérateurs basée sur le retour d’expérience des réacteurs en exploitation, notamment le palier N4 disposant d’une conduite informatisée ;
  • la prise en compte systématique des états à l’arrêt dans la conception, notamment dans les études d’accidents et dans les évaluations probabilistes ;
  • une étude plus systématique des accidents pouvant concerner le combustible stocké dans la piscine de désactivation dans le bâtiment combustible (BK) ;
  • une meilleure prise en compte des agressions internes et externes et de leurs cumuls (cf. paragraphe plus loin) ;
  • une utilisation des EPS dès le stade de la conception, en complément de l’approche de conception déterministe.

De plus, des dispositions ont été prises pour rendre physiquement impossible les situations d’accident grave susceptibles de conduire à des rejets précoces importants, ou, à défaut, de rendre ces situations très improbables avec un haut niveau de confiance (on parle alors de situations « pratiquement éliminées »).

L’EPR propose un plus grand niveau de redondance, de diversification et de séparation physique des systèmes de sauvegarde, à savoir :

Vue du réacteur EPR de Flamanville. Sur l'EPR, les bâtiments de sauvegarde sont distincts du bâtiment réacteur (Source : EDF)

  • une architecture à 4 voies, contre deux dans les réacteurs en exploitation (une seule voie suffit à garantir le respect des critères de sûreté) ;
  • des voies indépendantes et des systèmes en supports (circuits de refroidissement, alimentations électriques, contrôle-commande) indépendants ;
  • 4 bâtiments de sauvegarde distincts qui comportent chacun un système d’injection d’eau destiné au refroidissement de la cuve, un système d’alimentation de secours en eau pour les générateurs de vapeur ainsi qu’un système électrique et de contrôle-commande ;
  • des dispositions de diversification afin de pallier les risques de défaillances ayant pour origine une cause commune.

Amélioration de la gestion des accidents de perte d’alimentation électrique et d’eau de refroidissement

Le réacteur EPR peut également continuer de fonctionner en cas de perte totale d’alimentation électrique grâce à des systèmes d’urgence redondants :

  • 4 générateurs diesel d’urgence installés dans des bâtiments protégés et distincts du bâtiment réacteur. Chaque générateur peut alimenter un sous-système de sûreté pendant 72 heures ;
  • 2 générateurs diesel d’ultime secours. Ces 2 générateurs distincts afin d’éviter les défaillances de cause commune, peuvent fournir de l’électricité pendant 24 heures ;
  • 6 batteries destinées à alimenter le contrôle-commande et certains équipements essentiels, dont 4 batteries avec une autonomie de 2 heures chacune et 2 batteries « accidents graves » d’une autonomie de 24 heures chacune.

La diversification des systèmes de refroidissement est l’autre élément pris en compte dans le réacteur EPR. La fonction de refroidissement est renforcée par :

Essais du système d'injection de sécurité du circuit primaire (Source : EDF)

  • le système de secours d’alimentation en eau destiné à refroidir les générateurs de vapeur, comporte 4 voies assurant chacune 50 % de la fonction. Chacun des quatre bâtiments de sauvegarde dispose d’un réservoir, lequel peut être alimenté par la citerne destinée à prévenir les incendies ;
  • le système d’injection de sécurité destiné à refroidir le cœur avec de l’eau borée stockée comporte 4 réservoirs d’accumulation pressurisés et 1 réservoir de stockage d’eau situé en bas du bâtiment réacteur qui alimente les 4 voies des systèmes d’injection à moyenne et basse pression ;
  • 2 systèmes de refroidissement redondants pour la piscine de stockage du combustible, lesquels sont complétés par un troisième dispositif diversifié. À noter que la piscine de l’EPR est située dans une structure séparée du bâtiment réacteur, protégée par une double coque de béton.

La gestion des accidents avec fusion du cœur

Une série de dispositions nouvelles permettent de gérer les situations de fusion de cœur à basse pression de sorte qu’ils ne provoquent pas d’impact radiologique important pour la population et dans l’environnement :

Schéma du récupérateur de corium

Schéma du récupérateur de corium

  • le récupérateur de corium situé au fond de l’enceinte est capable de recueillir et de refroidir le cœur fondu en cas de rupture de la cuve. Il vise à protéger le radier de l’enceinte de confinement d’une interaction entre le corium et le béton ;
  • le système de refroidissement ultime permet d’une part, d’évacuer la puissance résiduelle du réacteur et de contrôler la pression à l’intérieur de l’enceinte et, d’autre part, de préserver l’intégrité de l’enceinte sur le long terme en cas d’accident grave. Il sert également à refroidir le corium dans le récupérateur ;
  • les traversées de l’enceinte de confinement (y compris le tampon d’accès des matériels) débouchent dans des bâtiments dont l’atmosphère est ventilée et filtrée. Ainsi, cela limite la possibilité de fuites directes de l’enceinte de confinement vers l’environnement.
Dispositions pour empêcher une fuite directe de l'enceinte de confinement. À gauche et au centre, Tampon d’Accès Matériel (son rôle : fermer l'accès matériel du bât. réacteur). À droite, raccordements électriques des traversées d’enceinte. (source EDF)

La protection contre les agressions

L’EPR présente des caractéristiques de conception permettant une meilleure robustesse vis-à-vis des agressions internes (incendie, inondation, explosion, projectile…) ou externes (séisme, chute d’avion, explosion, conditions climatiques extrêmes…), par exemple la coque avion.

Le réacteur EPR de Flamanville est en particulier mieux protégé des agressions externes que sont le séisme (radier commun à l’ensemble de l’îlot nucléaire) et l’inondation externe (calage de la plateforme prenant en compte l’évolution prévisible du niveau de la mer jusqu’en 2080).

De façon générale, la séparation géographique des bâtiments, en particulier des 4 bâtiments de sauvegarde et des 2 bâtiments des diesels, confère à l’EPR une meilleure résistance aux agressions pouvant affecter une partie du site, en partie aux effets potentiellement induits par l’agression extrême dans l’installation (explosion, incendie…). La répartition des systèmes de sauvegarde dans différents bâtiments améliore également significativement la protection contre les agressions internes telles que l’incendie, l’explosion ou l’inondation interne par rapport aux réacteurs du parc en fonctionnement.

Pour en savoir plus, lire Les risques étudiés
 

Les évaluations complémentaires de sûreté (ECS)

Après l’accident de Fukushima (Japon), des évaluations complémentaires de sûreté (ECS) ont été menées par EDF, à la demande de l’ASN. Ces évaluations ont consisté à évaluer la réponse des installations à des événements naturels extrêmes (le séisme, l’inondation et les conditions météorologiques extrêmes). Le réacteur EPR Flamanville a bénéficié, dès sa conception, de dispositions supplémentaires par rapport aux réacteurs en fonctionnement pour prévenir la survenue de situations de perte totale des sources froides et des sources électriques ainsi que pour la limitation des conséquences d’un accident grave.

De même que pour les réacteurs en fonctionnement, un noyau dur de dispositions a été défini pour l’EPR de Flamanville. Il comporte en majorité des systèmes et équipements déjà prévus à la conception. Des dispositions complémentaires ont été mises en place pour augmenter l’autonomie du réacteur en cas de perte de sources électriques (possibilité de réalimenter les bâches à fuel des groupes électrogènes d’ultime secours à partir des bâches à fuel des groupes électrogènes principaux, augmentation de l’autonomie des batteries dédiées à la gestion d’un accident grave).

Pour faire face à une perte totale et de longue durée des sources électriques, EDF prévoit, en sus du noyau dur, d’autres dispositions permettant de contrôler la pression dans l’enceinte de confinement et consistant :

  • à court terme, en une aspersion d’eau dans l’enceinte au moyen d’une motopompe autonome lignée sur un bassin situé en haut de la falaise surplombant le réacteur ;
  • à moyen terme, en l’acheminement sur le site d’une source électrique mobile de forte puissance permettant de réalimenter les systèmes participant au refroidissement de l’enceinte.

Pour en savoir plus

  • Tous les documents IRSN (avis aux autorités, rapports d'expertise, rapports aux groupes permanents d'experts) rendus publics concernant l'expertise de sûreté du réacteur EPR de Flamanville 3
  • L'expertise de l'IRSN